J’aimerais commencer mon récit comme un conte de Noël par « il était une fois …. » et le terminer par « ils vécurent heureux… », mais voilà, la vie n’est pas un conte.
Alors je préfère vous raconter comme une fiction, l’histoire de notre enfant, comme une fiction, qui arrive de la planète Prader-Willi. Une petite planète au fin fond de la galaxie et que très peu de gens  connaissent.

 
Voici l’histoire d’un petit extraterrestre

Toute ressemblance avec des personnes existant ou ayant existées serait une pure ……….

Après la naissance de deux enfants terriens, nous nous apprêtons à accueillir notre troisième enfant.

Lors de la commande nous oublions de préciser la planète d’origine. A vrai dire nous ne savons pas qu’il existe cette option.

Et voilà, un beau jour de septembre 1995, il arrive, livré avec son comportement, ses habitudes et son style de vie ancrés dans ses gènes. C’est un très beau petit garçon.

Dans les heures et les jours qui suivent cet heureux évènement, nos inquiétudes grandissent.

Ce joli et adorable petit « baigneur de chiffon » nous observe, ne gesticule pas, ne se plaint pas, ne pleure pas et ne demande jamais à manger. Lorsque nous lui proposons un biberon, il n’a pas le réflexe de succion comme tous les bébés. Mais d’où vient ce petit être ?
Après un certain temps, nous décidons d’appeler un technicien pour nous donner la marche à suivre. Nous appelons le service après-vente qui nous propose un rendez- vous.
Nous consultons des techniciens, médecin généraliste, pédiatre, endocrinologue……. pour essayer de mieux comprendre et aider notre enfant. Aucun de ces « techniciens » ne semblent maîtriser, voir décoder l’univers de notre petit.

A ses trois ans, nous remarquons qu’il a toujours faim et une forte tendance à prendre du poids contrairement à nos deux terriens. Il est devient obèse.

Nous reprenons rendez-vous auprès d’un nouveau technicien pédiatre qui nous demande de prendre un rendez-vous avec un technicien généticien. Il semble connaître le monde de notre fils.
Après nombre d’examens sanguins et quelques longs mois d’attente, le généticien demande à nous revoir.

Dans son bureau, le technicien généticien nous apparaît tel un dragon, crachant des flammes tout au long de son diagnostic. Le seul dragon que nous ayons rencontré dans notre vie nous apprend que :

« Cette enfant vient de la planète Prader-Willi, il n’a pas les mêmes composants qu’un terrien, il faudra lui apporter des modifications de temps en temps et tout au long de sa vie, avec d’autres confrères techniciens. Les Prader-Williens n’ont pas la même alimentation que les terriens. Ils l’apprécient pourtant beaucoup mais doivent en consommer moins que nous. Ils ont un rythme, des habitudes et une approche de la vie différente. Cela fait peu de temps que nous avons découvert la planète « Prader-Willi » et nous découvrons petit à petit son univers ».
Il nous donne le nom de l’association qui peut nous aider à mieux comprendre et vivre avec notre enfant. Les derniers mots qui vous donnent pleins d’espoir sont : « je vous souhaite bon courage. »
Après une digestion difficile de ce diagnostic, vient la question :
« Comment faire pour apprendre les codes d’un «enfant d’univers non identifié », livré sans le mode d’emploi ? ». Nous sommes parents d’un E.D.U.N.I

Depuis cette annonce nous apprenons, à chaque tranche d’âge, comment vivre avec un E.D.U.N.I.
Il apprend à vivre terrien et nous apprenons à vivre Prader-Willi. Nous n’essayons pas de lui imposer notre manière de vivre car pour lui certaines règles sont difficiles à mettre en place, alors nous nous adaptons. Je ne dis pas que c’est facile tous les jours, mais nous voyons notre Prader-Willien progresser, rire, chanter, et aussi être heureux.
Ce que je peux dire c’est que pendant ces années, nous avons perfectionné notre langage Prader-Willi.

Ce n’est pas un langage littéraire mais plutôt un « langage de terrain ».

Peu importe, cela ne fonctionne pas trop mal et nous ne cherchons pas avoir une licence ou une maîtrise en Prader-Willi.
Après une adolescence, disons un peu perturbée, un séjour à l’hôpital avec à la sortie un traitement, notre jeune homme devient un peu plus terrien et fait beaucoup de progrès.

La preuve en est, lors de la dernière visite avec le technicien endocrinien, ce dernier est surpris de voir la transformation d’un Prader-Willi en en terrien. Malgré un traitement médicamenteux et avec une surveillance de son alimentation, il a constaté une perte de 1,5kg en trois mois. Avant de quitter son cabinet il a dit à ce jeune homme de 18 ans qu’il était fier de lui et qu’il n’y avait pas de fatalité (encore une victoire supplémentaire !)
Mais cette histoire ressemble étrangement à la vôtre avec vos interrogations, vos inquiétudes, les visites régulières dans les divers cabinets médicaux, les hospitalisations, les traitements, les hormones l’hormone- de croissance, son  hygiène alimentaire, son entrée à l’école avec ce regard blessant des autres, ses brimades, ses moqueries, sa solitude et aussi vos inquiétudes en tant que parents. Inquiétudes qu’il ressent même si nous faisons tout pour les lui cacher. Il s’interroge sur son avenir.
Lorsqu’il regarde sa sœur et son frère, à quoi pense- t-il ?………..

Parfois bien qu’il soit à l’origine de moments difficiles vécus par la fratrie, il reste pourtant en admiration devant eux, modèles de ce qu’il voudrait tant être et qu’il a conscience de ne pouvoir atteindre.

Malgré cela, restons positifs. Et à vous parents de jeunes enfants, je veux vous dire qu’il y a des moments difficiles mais pas insurmontables. Il y a, aussi, beaucoup de moments de bonheur.

Nos enfants sont pleins de ressources pourvu que nous les guidions dans cet univers qui n’est pas toujours facile et adapté pour eux.

N’essayons surtout pas d’imposer notre vie, notre société à nos enfants. Cela se fera mais à leur rythme. Ils ont besoin de temps.
Chaque tranche d’âge est difficile à aborder que ce soit avec notre PW comme avec tout enfant.

Le syndrome de Prader- Willi s’est invité dans notre vie, il faut faire avec lui, ne pas lui donner trop d’influence (préserver le couple, la fratrie et notre vie sociale) et l’apprivoiser.

La recherche progresse. Les nouveaux nés ont une prise en charge précoce, ce qui permet de mieux maîtriser certains aspects du syndrome.

Depuis le début de leur vie ils nous montrent qu’ils veulent bien faire et nous faire plaisir, mais ils n’ont pas tous les codes, toutes les règles. Donnons-leur tout l’amour qu’ils méritent.

Les adultes et les petits « terriens » ont plus de facilité à s’adapter et pour autant n’acceptent pas la différence … et

Faisons notre maxime de cette jolie phrase de Martin GRAY :

Vivre c’est espérer qu’au-delà du prochain tournant le plus beau paysage nous attend !

Jacques et Claudie Leblanc