DEssin d'Aurélie PWF50

Nous nous trouvions, mon mari et moi, à l’hôpital marin d’Hendaye, avant de laisser notre fille Aurélie dans le pavillon Bretonneau qui accueille les personnes atteintes du SPW. Mr. Pierre Copet, psychologue, nous a reçus pour échanger autour de la personne PW, parler des conséquences du syndrome sur sa vie, de ce qui la singularise et la rend un peu ‘‘étrange’’. Si nous comprenons le fonctionnement mental de nos enfants, ados ou adultes, nous pouvons mieux les accompagner au quotidien.

Pour qu’ils soient épanouis dans leur vie et qu’ils se sentent bien avec les autres, il leur faut respecter certaines règles qui sortent de l’ordinaire.

Les pulsions alimentaires et le régime plus ou moins strict sont des contraintes majeures qui empêchent l’autonomie de la personne PW. L’alimentation accessible génère un stress alimentaire permanent. Lorsque l’accès à l’alimentation est impossible, c’est un soulagement pour la personne. Ce n’est pas la faim qui les tourmente mais une obsession réglée par une hormone au niveau du cerveau. Savoir quand ‘‘je vais manger’’ et ce que ‘‘je vais manger’’ dans la journée est extrêmement important pour eux.

Certains troubles du développement neuropsychologique vont entraîner des complications supplémentaires dans sa socialisation.

Nous devons la guider pour qu’elle prenne confiance en elle.

La personne PW a une bonne mémoire, ce qui lui permet de suivre une formation académique mais elle ne peut pas exercer les responsabilités liées au métier éventuellement appris. Elle est incapable d’évaluer son implication personnelle dans une situation. Une fois cela accepté par son entourage, il faut lui faire reprendre confiance dans ses capacités qui sont bien réelles ; elle nous sait gré de ce qu’on lui apporte, elle sait qu’elle peut compter sur nous.

Son énergie n’est pas la nôtre.

Les fonctions exécutives qui nous aident à réaliser les tâches non routinières vont lui demander beaucoup d’énergie. Il est indispensable de programmer ses journées, de lui donner des repères. Un emploi du temps bien structuré est rassurant. Composer avec elle son programme pour la rendre responsable va l’aider à acquérir une forme d’autonomie. Il est important de la valoriser dans ce qu’elle sait faire. ‘‘C’est moi qui ai décidé, choisi cette activité.’’

La question qui revient souvent le soir est : ‘‘Qu’est-ce que l’on fait demain ?’’ Annoncer le programme du lendemain même si rien de particulier n’est prévu va lui éviter une angoisse qu’elle ne peut gérer.

Quel est le fond de sa pensée ?

Le niveau intellectuel et la capacité de juger sont deux choses différentes. Sa faiblesse de raisonnement et son manque de souplesse vont rendre difficile son adaptation aux contraintes sociales. Il lui est très difficile d’innover. Il nous faut donc exercer une supervision mais il faut que cette supervision soit acceptable pour la personne. Elle nous fait confiance dans nos décisions. Encore faut-il apporter tous la même réponse. S’il n’y a pas de cohérence dans le discours entre les différents intervenants, c’est un drame. Plus rien ne va. Il faut tout reconstruire.

Parler avec elle est essentiel.

Bien que les mots soient pris au sens propre et que l’abstraction soit difficilement possible, les troubles émotionnels et affectifs ressortent facilement dans l’expression.

Construire un projet personnel dans le SPW où la frustration est très présente n’est pas toujours aisé. Il faut tenter de trouver une compensation à cette frustration : parler est essentiel, le faire en groupe permet de laisser jaillir la parole.

Ainsi, la relation avec le groupe (à l’hôpital marin) peut faire sortir la vérité. On découvre un mode de pensée très imaginatif : construction imaginative de ce que la personne aimerait être dans la vie, mais qu’elle ne sera pas. Nous sommes là pour réguler ces échanges parfois trop persuasifs.

La relation interpersonnelle est affective, la personne PW est fusionnelle et entre pairs, ils deviennent jaloux, possessifs et excessifs. Il faut gérer ces moments-là. Par manque de confiance en soi, la peur de la réponse de l’autre est omniprésente. Se sentir aimé dans un cadre rassurant va permettre la libre expression libérée de l’angoisse.

Elle a du mérite.

Quand la personne PW est capable de se dépasser pour accomplir une tâche, pour une activité sportive par exemple, cela nous encourage. La personne sait ce qu’elle doit faire pour garder son poids, elle sait que le régime alimentaire ne suffit pas, que bouger tous les jours est essentiel : une marche, une partie de ballon, un peu de fitness ou un cours d’aquagym… Elle s’y adonne avec toute son énergie et éprouve une vive satisfaction lorsqu’elle réussit à aller jusqu’au bout de l’épreuve. Ces moments-là, elle sait nous les faire partager. C’est une grande joie pour tous.

La personne Prader-Willi change notre regard sur la vie. Elle nous montre que nous sommes pleins de ressources. La vie est faite d’espoir. Quand on la voit vivre dans notre monde qui ne lui correspond pas, nous devons poursuivre nos efforts.

Blandine Guillaux avec l’aide de Mr. P. Copet, psychologue à l’hôpital marin de Hendaye.

Mr Pierre Copet est parti à la retraite. Maintenant, c’est Julie Tricot qui accompagne nos adultes en séjour temporaire à l’hôpital marin.